Ryu, écoles et styles d'Aïkido

A l'origine des styles

L’Aïkido est l’art créé par Maître Ueshiba Morihei ; fruit d’une étude intense, d’expériences martiales, et de son évolution aussi bien technique que spirituelle.
Dans l’Aïkido d’O-sensei d’avant-guerre, qui baignait dans un milieu militaire et nationaliste, l’esprit guerrier était particulièrement présent (comme la pratique du Juken-dori : techniques contre baïonnette). Mais, mis à part cet aspect très martial, l’Aïkido qu’il pratiquait à cette époque-là présentait peu de différences dans la forme technique, comparé avec sa pratique des années 50-60.
Alors comment expliquer que des élèves directs d’O-sensei, dont certains issus d’une même génération d’uchi-deshi, aient une pratique différente au point de voir l’émergence d’écoles ? Même si d’autres hypothèses sont avancées - auxquelles je n’adhère pas - il me semble plus plausible que les différences soient essentiellement dues à deux facteurs interdépendants :
- le premier tient à la nature de l’Aïkido dont les techniques non figées, adaptables, ont de multiples formes d’exécution, et ce, même en restant dans un registre fondamental.
- le deuxième dépend de la personnalité de ces élèves directs (tempérament, morphologie, compétences et capacités, expériences acquises dans d’autres budo…). Dès lors, chacun va orienter sa pratique en fonction de ses penchants et mettre l’accent sur des aspects en relation avec sa sensibilité, ses aspirations, et ce qu’il aura perçu de l’enseignement de Maître Ueshiba (aspect martial, philosophie, recherche énergétique…) ; tous ces aspects étant présents à des degrés divers dans un même courant.

Pluralité de la discipline et transmission

Fort de ses expériences et de son vécu, chacun de ces sensei - parfois issu d'autres arts martiaux - essayera par la suite de transmettre les enseignements du Fondateur et de promouvoir cet héritage. S'engageant dans des voies légèrement différentes, ou se focalisant davantage sur tels ou tels aspects de la discipline, certains auront un aïkido visuellement reconnaissable ; particularité d’autant plus marquée si l’enseignement est très codifié.
Si certains étaient sincèrement soucieux de sauvegarder un art dont ils voulaient préserver l'authenticité, d'autres par contre étaient motivés par des ambitions personnelles. D'autres encore, se croyant investis d'une mission et convaincus de détenir la vérité sur un art qu'ils croyaient figé, créeront aussi leur propre courant.
Pourtant, du vivant d'O-sensei, ses élèves les plus proches et les plus éminents pratiquaient déjà "leur" aïkido - au sein même de l’Aïkikaï - sans que le Fondateur n'intervienne pour les ramener sur la "bonne" voie, estimant sans doute que leur pratique, certes quelque peu différente, était juste ; actant de fait la pluralité de la discipline. Si l’Aïkido est unique dans son esprit, il est multiple dans ses formes. Dans la pratique des élèves de Me Ueshiba, il peut donc y avoir en apparence une différence due à leur personnalité, mais fondamentalement, cela reste de l’Aïkido, dès lors que ses principes généraux et son esprit sont respectés. Aucune de ces branches n'est donc supérieure ou ne peut se prétendre plus authentique que les autres. Les querelles de styles sont par conséquent stériles, et plutôt que chercher à imposer sa vision aux autres, la coexistence de ces différents courants devrait être empreinte de tolérance et d'échanges.
Aujourd’hui encore, des scissions au sein même de ces organisations entraînent la création de nouvelles "écoles", générant encore un peu plus de confusion. Des pratiquants au passé martial relativement quelconque créent à leur tour de nouveaux courants. La création de ces pseudo-écoles n’est - souvent - que la conséquence de conflits de personnes, de luttes de pouvoir, de frustrations, du désir de satisfaire des ambitions…

Principales branches de l'Aïkido

Aikikai (de Me Ueshiba)

Le Zaidan Hojin Aikikai (Fondation Aïkikaï - Centre Mondial de l’Aïkido). C’est la continuité de l’enseignement du Fondateur (Kaiso), Ueshiba Morihei (1883-1969). L’Aïkikaï sera développé par son fils Ueshiba Kisshomaru (1921-1999). C’est grâce aux efforts de ce dernier et aux shihan du Hombu Dojo qu’il délèguera à travers le Monde, que l’Aïkido entamera son essor international.
Loin d’être un style, c’est plutôt une organisation où s’expriment plusieurs courants. De nombreux instructeurs - aux pratiques différentes - enseignent régulièrement au Hombu Dojo ; preuve d’une certaine ouverture d’esprit. C’est le groupe le plus important dans le monde et auquel sont rattachées la Fédération Internationale d'Aïkido (F.I.A.) et notre fédération : la F.F.A.B.
Actuellement, c’est Ueshiba Moriteru, petit-fils du Fondateur, qui est le 3ème Doshu (Maître de la Voie) depuis 1999.

— 3e doshu - Ueshiba Moriteru —

Shodokan Aikido (de Me Tomiki)

Le Shodokan (Lieu où on identifie la Voie) a été créé par Me Tomiki Kenji (1900-1979) au sein de la J.A.A. (Japan Aikido Association). Me Tomiki a été également élève de Maître Kano Jigoro, fondateur du Judo. Influencé par son expérience au Judo, il a introduit un système de compétition dans son style. Estimant que la compétition était incompatible avec l’Aïkido, Maître Ueshiba était opposé à cette innovation qui s’éloignait de l’esprit de la discipline. Le Shodokan se caractérise par la compétition (à mains nues et en tanto-do), la pratique de kata et d’une tenue sans hakama.
Nariyama Tetsuro shihan, est le Directeur Technique actuel de la J.A.A.

— Tomiki Kenji sensei —

Yoseikan (de Me Mochizuki)

Le Yoseikan (Lieu où on enseigne l'éducation et la droiture) a été créé par Me Mochizuki Minoru (1907-2003). Ce dernier était élève de Maître Kano Jigoro (1860-1938) - fondateur du Judo - qui l’envoya étudier auprès de Me Ueshiba. C’est Maître Mochizuki qui fera connaître l’Aïkido en France au cours d’un séjour en 1951. Il développera une discipline qui sera la synthèse des arts martiaux japonais qu’il avait étudiés (Aïkido, Judo, Ju-jutsu, Karaté…), intégrant kata, sutemi...
Hiroo, fils de Me Mochizuki, poursuivra l'œuvre de son père en la modifiant dans un style appelé Yoseikan-Budo. Un autre élève de Me Mochizuki, Alain Floquet, reprendra le nom de l’Aïkido d’avant-guerre : Aïkibudo, pour désigner son courant.

— Mochizuki Minoru sensei —

Yoshinkan (de Me Shioda)

Le Yoshinkan (Lieu où on développe l’esprit) a été créé en 1954 par Me Shioda Gozo. Style fortement influencé par la période d’avant-guerre, il privilégie l’efficacité. Il met l’accent sur une pratique vigoureuse et une étude solide des techniques de base et des fondamentaux. Il a été adopté par différentes forces de police au Japon.
Yasuhisa - fils de Me Shioda - a succédé à son père à la tête du Hombu Dojo Yoshinkan.

— Shioda Gozo sensei —

Shin-Shin Toitsu Aikido (de Me Tohei)

Le Shin-Shin Toitsu Aikido (Aïkido avec l’unification du corps et de l’esprit) a été fondé par Maître Tohei Koichi (1920-2011) qui s’est détaché de l’Aïkikaï en 1974. Le style est associé à la Ki-no-Kenkyukai (Ki Society) aux U.S.A. où il est particulièrement implanté. Tohei sensei décrivait l’Aïkido comme une voie permettant à l’être humain de développer son Ki et s’assimiler dans celui de l’Univers. L’enseignement intègre des exercices pour le développement du Ki, l’unification corps-esprit, de kiatsu (massages énergétiques).
Shinichi - fils de Me Tohei - a succédé à son père à la tête du Ki-no-Kenkyukai (Ki Society).

— Tohei Koichi sensei —

Iwama-ryu ou Takemusu-Aiki (de Me Saito)

L’Iwama-ryu est le style de Maître Saito Morihiro (1928-2002). Il doit son nom au dojo basé à Iwama où il enseignait. Il était rattaché à l’Aïkikaï. Saito sensei voulait préserver l’enseignement reçu à Iwama. Il enseigna un Aïkido très rigoureux dans sa forme avec une place importante accordée au travail des armes sur la base de formes codifiées.
Son fils Hitohiro lui succédera et se détachera de l’Aïkikaï. Il nommera son école Iwama Shin-Shin Aiki-Shuren-kai.

— Saito Morihiro sensei —

Ki-no-michi (de Me Noro)

Le Kinomichi (Voie du Ki) est l’école créée par Me Noro Masamichi (1935-2013). C’est un style aux mouvements amples et circulaires qui privilégie une relation harmonieuse entre Tori et Aïte pour un bénéfice mutuel. Le travail avec partenaire est dynamique et relâché, basé sur l'étirement, le mouvement, la respiration, l'ouverture, le contact, la spirale et la verticale.
Takeharu - fils de Me Noro - a succédé à son père à la tête du Kinomichi et du Korindo Dojo.

— Noro Masamichi sensei —

D’autres organisations centrées sur l’enseignement d’un sensei

Certains shihan de l’Aïkikaï ont créé des organisations internationales dans le but de rassembler les pratiquants qui suivaient leur enseignement à travers le monde. Elles sont pour la plupart affiliées à l’Aïkikaï. Parmi elles :
- Birankai de Chiba Kazuo sensei
- Sansuikai de Yamada Yoshimitsu sensei
- Sakura Aikikai de Nishio Shoji sensei
- Aikido Schools of Ueshiba de Saotome Mitsugi sensei
- Tendo-ryu Aikido (Tendokan) de Shimizu Kenji sensei
- etc.
Notre fédération F.F.A.B. - au travers de ses activités, de celles de l’E.N.A. (Ecole Nationale d’Aïkido) et du Dojo de Shumeikan - a pour objectif de pérenniser l’enseignement de Maître TAMURA Nobuyoshi.